Page:Boutroux - Études d’histoire de la philosophie.djvu/240

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objet que lui-même, est encore un Dieu caché, incomplètement révélé. C’est Dieu en tant que possible, c’est l’idéal divin. Pour que cet idéal se réalise et que Dieu soit la personne vivante, il faut que la volonté continue l’œuvre de génération éternelle qui n’est encore que commencée. Il faut à Dieu une seconde naissance.

C’est ici surtout que la loi des contraires va trouver son application. Considérons toutes les choses de ce monde qui existent véritablement ; elles sont faites du oui et du non : « In Ja und Nein bestehen alle Dinge. » Le jour ne serait pas sans la nuit, ni la nuit sans le jour, le froid est la condition de la chaleur et la chaleur du froid. Supprimez l’opposition et la lutte, et tout va rentrer dans le silence et l’immobilité, tout va retourner au néant. L’un en tant qu’un n’a rien qu’il puisse vouloir. Pour qu’il veuille et qu’il vive, il faut qu’il se dédouble. De même l’unité ne peut se sentir, mais dans la dualité la sensation est possible. Il faut donc, pour qu’un être soit posé comme réel, qu’il soit opposé à son contraire ; et le degré de l’opposition mesure le degré de la réalisation.

Or, dans le développement de l’activité divine que nous avons considéré, Dieu n’a pas été opposé à quelque chose qu’on puisse à bon droit appeler son contraire. La puissance d’objectivation en présence de laquelle il s’est trouvé et qu’il a déterminée de manière à en former sa fidèle image ne différait de lui que comme l’idée diffère de l’intelligence. Rien, dans ce principe passif, qui