Page:Boutroux - Études d’histoire de la philosophie.djvu/248

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égoïste de la nature, est dévoré et rendu au néant. Les ténèbres s’allument et deviennent le feu vivant et manifeste, foyer de la lumière. La nature désormais est assujettie à l’esprit, et capable de le réaliser. Une loi divine s’est accomplie qui s’appliquera désormais à tous les êtres. Toute vie, selon cette loi, implique une double naissance. La souffrance est la condition de la joie, c’est en passant par le feu ou par la croix qu’on arrive à la lumière. Per crucem ad lucem. Dans l’ordre intellectuel comme dans l’ordre physique, l’enfantement est précédé par un état de malaise et d’inquiétude. La nature travaille et souffre, et ne se sent pas la force de mettre au jour le fruit qu’elle a conçu. Tout d’un coup, cependant, un effort comme surnaturel se produit, la souffrance et la joie s’entrechoquent dans un instant indivisible, l’éclair jaillit, et le nouvel être passe des ténèbres à la lumière. L’enfant de la chair possède désormais sa forme et se développera par lui-même, suivant son idée directrice ; le fruit de l’intelligence n’est plus un chaos d’idées vagues et incohérentes, c’est une pensée consciente et sûre d’elle-même, qui s’engage sans hésiter dans l’expression qui la manifeste.

Avec l’apparition de l’éclair a pris fin la première existence de la nature divine, le développement de la triade négative. En même temps commence le développement d’une triade positive, qui représente l’existence seconde et définitive de la nature. Contraction, expansion et rotation vont se retrouver dans le progrès de cette nature