Page:Boutroux - Pascal.djvu/62

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les convenances, les proportions, les vrais originaux de tout ce que l’on cherche à connaître.

De telles théories ne pouvaient manquer de frapper Pascal. Existait-il donc, dans la nature humaine, quelque faculté plus haute que les sens et le raisonnement ? Était-il vrai que la vie de société, en développant en nous les qualités de l’honnête homme, nous dote d’une vivacité et d’une finesse d’esprit particulière, qui nous permet de pénétrer l’intérieur des choses, là où les démonstrations n’en déduisent que les formes abstraites et les rapports extérieurs ?

Dans cette disposition d’esprit, Pascal s’abandonna d’autant plus au commerce du monde. Il n’en dédaigna pas les futilités. On a retrouvé dans un château de Fontenay-le-Comte, ville peu éloignée de Poitiers des vers écrits de sa main au dos de deux tableaux et peut-être composés par lui, dans lesquels il remercie une dame qu’il a sans doute visitée avec ses amis. L’une des strophes est ainsi conçue :


De ces beaux lieux, jeune et charmante hôtesse,
Votre crayon m’a tracé le dessin ;
J’aurais voulu suivre de votre main
La grâce et la délicatesse.
Mais pourquoi n’ai-je pu, peignant ces dieux dans l’air,
Pour rendre plus brillante une aimable déesse,
Lui donner vos traits et votre air ?


Dans un séjour en Auvergne qui parait avoir suivi le voyage au Poitou, à la fin de 1652 et au commencement de 1653, Pascal, selon Fléchier, faisait continuellement sa cour, avec deux autres amants, à une savante, qu’on appelait la Sapho du pays. Cette