Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/115

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une nouvelle division. Mais les Suisses papistes sont devenus sages à leurs dépens ; & les réformés aiment mieux patienter & souffrir quelque chose, que de replonger leur patrie dans une guerre civile.

Quelque-tems après l’introduction de la réformation, la différence des opinions faisant beaucoup de bruit, & les magistrats craignant que ces divers sentimens ne causassent quelque émeute & quelque sédition populaire, ils résolurent tous d’un commun accord, que dans les cantons où il y auroit plus de papistes que de réformés, chacun suivroit dorénavant le parti du souverain pontife ; & que dans ceux où le nombre de ses partisans seroit moindre que celui des adversaires, on se sépareroit entiérement de sa communion. Cela fut exécuté avec autant de facilité qu’on l’avoit projetté. Tout resta tranquille ; & chacun vécut paisible chez lui. Ce n’est pas aimer les querelles & les divisions, que d’agir d’une manière si prudente & si sensée. Les Suisses sont les seuls peuples capables de prendre un parti où il entre autant de franchise & de naïveté. Aussi ne se piquent-ils pas d’être grands philosophes. Je ne crois pas qu’il y ait jamais eu dans leur pays beaucoup d’auteurs dont