Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/133

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il pas loin. On voit tout-à-coup la formation de quelques nouveaux empires, qui paroît presque aussi subite que la naissance des hommes, & qui se détruit & s’éteint avec autant de facilité que les misérables mortels. Un homme qui, quarante ou cinquante ans avant le règne d’Alexandre, auroit annoncé aux Macédoniens, qu’ils seroient les maîtres de toute l’Asie, & d’une partie de l’Europe, eût sans doute passé pour un insensé. La chose est arrivée si subitement, qu’il faut que nous en ayions une aussi grande certitude que celle que nous en avons, pour ne pas croire que les histoires qu’on nous en débite sont des romans.

Si le feu roi de Suède n’eût point perdu cette fameuse bataille, qui conserva le trône de son rival, de quels pays n’eût-il point été le maître ? Quelle révolution soudaine n’arrivoit-il pas, si, lorsque ce même roi de Suède étoit fugitif en Turquie, de simples paysans ramassés à la hâte, montés sur des chevaux, dont la plus grande partie n’avoit ni selle, ni bride, n’eussent point défait & battu les Danois, qui cherchoient à pénétrer dans la Suéde, dépourvue d’argent & de troupes, sans roi & sans espoir de secours ?

A quoi étoit réduite toute cette gloire de