Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/176

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terrestre, qui devoit les instruire de tous les secrets de la céleste, qui lui avoit révélé toutes ses opérations & ses desseins. Est-il possible qu’un sçavant tel qu’Averroes ait pû penser & écrire de pareilles extravagances ? [1]

Si Aristote est la suprême vérité, il est inutile que les hommes s’appliquent désormais à la découverte de la nature des choses : ils ne peuvent plus rien apprendre de nouveau, Tout est compris dans les écrits du philosophe Grec. Il est la suprême vérité & l’oracle qui doit nous instruire de tout ce qu’il est possible de sçavoir.

Gassendi fut le premier qui dans le siécle passé, osa attaquer l’infaillibilité d’Aristote. [2] Il trouva presqu’autant d’adversaires & d’ennemis, que le premier janséniste appellant de la bulle Unigenitus. Les honnêtes gens lui ont l’obligation d’avoir ramené dans le monde l’usage d’une philosophie raisonnable, à laquelle un galant homme peut s’appliquer.

Ce grand génie fut suivi de Descartes,

  1. Aristotelis doctrina est summa veritas, quoniam ejus intellectus suit finis humani intellectus. Quare bene dicitur de illo, quod ipse fuit creatus, & datus nobis divina providentia ut non ignoremus possibilia sciri. Averroés, de Gener. Anim. Lib. V. cap. I.
  2. Le premier ouvrage qui fit connoître ce sçavant dans le monde, fut celui Adversus Aristotelicos.