Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/182

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Qui est-ce qui doute, que tout dépend de la forme, & que la matière seule ne fait rien ? On est à coup sûr aussi ignorant après avoir sçu ces choses, qu’avant de les sçavoir. Les huit livres de la physique d’Aristote appartiennent plutôt à la logique qu’à la physique. Ce ne sont que des définitions de mots vagues & généraux, qui ne présentent à l’entendement que des idées peu distinctes. Aristote, par exemple, dit bien qu’y a quatre élémens, le feu, l’air, l’eau & la terre ; mais il n’en fait point connoître la nature : on n’en sçauroit concevoir, par tout ses raisonnemens, aucune idée juste. Il ne veut pas même, & que ces élémens soient le feu, l’air, l’eau & la terre que nous voyons ; puisqu’il faudroit alors que nos sens pussent au moins nous en communiquer quelque connoissance : il tâche de les expliquer par les qualités de chaleur, de froideur, d’humidité, de sécheresse, de pesanteur & de légereté. Comment est-ce que des hommes qui avoient de l’esprit, ont pû se contenter d’une explication aussi vague, & qui entraîne après elle tant de ridiculités & d’impertinences ? Je ne m’en étonne point, puisqu’ils étoient assez complaisans