Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/219

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ont reconnu un Dieu suprême, un seul Etre tout parfait. Mais je crois qu’ils n’ont jamais eu aucune idée véritable de la Divinité ; & que dès le moment que les hommes furent plongés dans l’idolâtrie, ils n’eurent plus aucune notion juste de Dieu, dans quelque pays qu’ils habitassent. Quand je parle des hommes, j’entens même les plus éclairés : je comprens parmi eux les philosophes Egyptiens, Grecs & Romains. Les premiers admettoient deux divinités premières & éternelles, le soleil & la lune qui gouvernoient tout l’univers. Ils croyoient que tout le corps de la nature étoit formé du corps de ces deux astres ; & que l’esprit, le feu, le sec & l’humide étoient des portions ou des membres de ce corps. [1]

Cela a grand rapport avec les mortifications de Spinosa. Aussi le systême de ce juif apostat étoit-il celui de presque tous les philosophes anciens, qui l’embrouilloient par plusieurs autres faussetés qu’ils y mêloient. Lorsqu’on vient à débrouiller ce chaos d’idées fausses &

  1. Ideoque totum naturae universae corpus sole & luna consummari ; cujus partes jam indicatae, spiritus, ignis, siccitas, humor, & aeria tandem natura ; è quibus, ut in homine, caput, manus, pedes & alias partes numeramus, codem modo corpus mundi constat. Diodor. Sicul. Lib. II. cap. II.