Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/235

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qu’elles n’aimoient point. Pourquoi seroient-elles condamnées à passer leurs beaux jours dans la tristesse & dans la mélancolie ? Et si les loix leur font un crime d’un desir que leur donne la nature, pourquoi les hommes firent-ils ces loix bizarres ?

C’est ainsi qu’une infidéle trouve des raisons pour se justifier. La coquette ne manque point aussi d’excuses. « Est-ce un mal, dit-elle, de vouloir plaire ? Dès qu’on ne devient point criminelle, quel dommage les douceurs qu’on me dit, les honneurs qu’on me rend, font-ils à mon époux ? Quoi ! parce que je suis mariée, je ne puis ouir des louanges que je mérite, je serai forcée de fuir ceux qui m’accableront de politesse ? Pour plaire à mon mari, pour calmer sa folle jalousie, il faudra que je vive comme une ourse, retirée dans une tanière ? Tampis pour lui, s’il est assez fou pour se mettre mal-à-propos mille chimères dans l’esprit. Mais je n’irai point m’enterrer toute vivante pour rappeller sa raison. »

C’est ainsi que la coquette justifie et autorise sa conduite. Et pourquoi ne le feroit-elle pas, puisque celle qui vend ses faveurs, trouve encore le secret de se