Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/241

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Les philosophes & les sçavans parlent sans cesse du mépris de la gloire, de la sagesse, de la tranquillité de l’ame. Malgré tous leurs beaux & magnifiques discours, il est certain que sans la gloire & la vanité, l’ignorance étendroit son empire sur tous les hommes. C’est au desir de se distinguer du vulgaire, de surpasser les personnes avec lesquelles on vit, & de leur inspirer de l’admiration, que l’antiquité a dû les Aristotes, les Platons, les Sophocles, les Euripides & les Démosthènes. C’est à lui que les modernes doivent les hommes illustres, qui ont fait dans ces derniers tems de si beaux & si sublimes ouvrages.

Si tous les différens sçavans n’avoient eu en vûe que d’étudier les vertus morales, que de se perfectionner dans la sagesse, ils eussent borné leurs soins à se connoître eux-mêmes.

Ils n’eussent point cherché à mesurer les cieux, à suivre les planètes dans leurs cours, à examiner les différentes productions de la nature, à en faire l’anatomie, à pousser la subtilité de leurs découvertes jusqu’à découvrir la pesanteur de l’air. Tout cela, eussent-ils dit, est inutile à nos desseins. Quel est le but que nous avons ? C’est de chercher le moyen de nous rendre heureux, & d’être utiles au bonheur des autres hommes. Etudions donc ce qui peut servir à