Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/244

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Ce n’est pas-là, mon cher Isaac, la manière ordinaire dont les sçavans instruisent les hommes. Ils se gardent bien de tenir ce langage. Ceux qui parleroient de même, ressembleroient à des pontifes Romains qui blâmeroient la croyance aux indulgences. On pourroit les regarder également comme des gens qui décrieroient leurs marchandises. Loin d’en agir ainsi, tout homme de lettres cherche d’élever jusqu’aux nues le genre d’étude auquel il s’applique. Il voudroit même en établir la gloire aux dépens des autres sciences. Un rhétoricien ne loue que foiblement la philosophie. Le plus grand effort de l’esprit humain consiste, selon lui, dans le talent de persuader par la force de l’éloquence, & d’émouvoir les cœurs par la noblesse de la diction. Un philosophe au contraire, regarde un rhétoricien comme un dissertateur, dont les discours n’ont que des faux brillans, & n’offrent rien de solide à ceux qui veulent des raisons, & non pas des paroles. Comme le physicien, il va même jusqu’à condamner entiérement l’usage & l’étude de la rhétorique comme des choses pernicieuses au bien public. Ceux qui masquent & fardent les femmes, dit un fameux philosophe sceptique,