Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/300

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ou les fais-je produire ? Si je veux, je rendrai vos champs secs comme de la paille sans grain. Et cependant vous êtes superbes, & vous dites : Quoi ! nos grains que nous avons semés seront perdus ? Au contraire, nous les conserverons. Imbécilles ! pouvez-vous parler ainsi ? Levez les yeux au ciel. Considérez l’eau qui en tombe & qui sert à vous désaltérer. La faites-vous descendre des nues ; ou si c’est nous qui l’en faisons descendre ? Si nous voulons, elle ne tombera point, ou nous nous la ferons tomber si mauvaise qu’elle ne pourra servir, ni à faire fructifier vos champs, ni à vous désaltérer. [1]

Je te demande, mon cher Monceca, ce que tu pense de ce passage. Quelle noblesse n’y trouve-t-on pas ? Quelles grandes idées n’offre-t-il point à l’imagination ? Avec quelle majesté ne représente-t-il pas l’immense pouvoir de la divinité, après en avoir prouvé l’existence évidemment par ce peu de mots : Nous vous avons tous créés. Si vous ne le croyez pas, considérez les biens que vous possédez : les avez-vous créés vous-mêmes ? C’est-là le plus invincible

  1. L’alcoran de Mahomet, translaté d’Arabe en François par le sieur Duryer, pag. 112.