Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/308

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récrient sur certains contes fabuleux qui sont dans l’alcoran. Ils rient de l’imbécillité des Turcs de croire de semblables chimères. Mais Mahomet n’a jamais dit d’aussi grandes impertinences que le rabbin Abraham, qui s’est imaginé que les satyres ou faunes étoient de véritables créatures, mais imparfaites, parce Dieu ayant été surpris par le soir du sabbat, n’avoit pû leur donner leur perfection ; & que pour cela, ces monstres fuyant la sainteté de ce jour, & se retirant dans les montagnes & dans les bois pour s’y cacher, ils reviennent ensuite tourmenter les hommes.

Peut-on pousser l’égarement de l’esprit plus loin, que de regarder Dieu comme un vil sculpteur, qui, à la fin de la semaine, n’ayant pû achever son ouvrage, l’a laissé imparfait ? Accorde, mon cher Monceca, cette absurdité avec la grandeur & la prompte exécution des opérations de la divinité. Elle n’a qu’à ordonner, la nature obéit, & change de face. Il peut la détruire dans un instant, comme il l’a créée dans un instant. Il a dit : Que la lumière se fasse, & la lumière se fit : il n’a qu’à dire : Que la lumière cesse, & la lumière cessera.

Porte-toi bien, mon cher, Monceca : &