Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/323

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que s’ils étoient à la veille d’être attaqués par les ennemis. On m’a dit, qu’avant cette derniere guerre, ils paroissoient moins attentifs à remplir leur devoir ; & que la paix & la tranquillité leur avoient fait perdre cette sévérité & cette exactitude si nécessaires dans le métier de la guerre ; mais ils ont repris actuellement l’ancienne discipline qu’ils avoient négligée.

Les habitans de ces places de guerre sont beaucoup moins heureux que les autres François : ils sont esclaves de trois ou quatre petits tyrans, qui, sous prétexte du bien du service, & de la sûreté de la ville, tranchent du souverain, décident de la tranquillité, & presque du sort de tous les bourgeois. Les gouverneurs, les lieutenans-de-roi, & les majors, ressemblent assez aux nouveaux souverains pontifes. Les premiers viennent pauvres dans leur poste, & s’y sont bientôt enrichis : les derniers, à l’abri de la thiare, élevent promptement leur amis & leurs parens au plus haut dégré. Tout cela se fait aux dépens du pauvre peuple, qui ne semble né que pour être la victime de quiconque est chargé de le protéger. Je regarde les militaires, excepté néanmoins ceux d’entr’eux qui ont assez de probité pour respecter