Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/350

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la Provence, & que ce pays essuyoit la punition de ses crimes, ces malheureux caffards songeoient à repeupler les villes, & à réparer le dommage que causoit la peste. Deux d’entre eux porterent leurs excès jusqu’à violer une jeune fille, qui desservoit avec eux les infirmeries. On les arrêta : mais ils trouverent le moyen de se sauver ; & par arrêt du parlement, ils furent pendus tous deux en effigie.

C’est un nommé François, qui a été le fondateur des premiers monastères de ces fainéans. Cet homme étoit fin & délié. Il trouva le secret, pendant sa vie, de donner un air de sainteté aux actions les plus extravagantes. Ses disciples ont écrit ses principales actions ; & il n’en est aucune, quelque ridicule qu’elle soit, qu’ils n’ayent relevée par de grandes louanges. Un jour, disent-ils [1], une cigale annonçoit la belle saison par son chant. François appella l’animal ; & l’ayant sur son doigt, allons ma sœur la cigale, lui dit-il, chantez les louanges de la divinité. La cigale obéit ; & lorsqu’elle eut achevé sa chanson, François la remercia fort poliment, & chanta lui-même à son tour.

« Votre soin n’est plus nécessaire, Vous pouvez désormais partir en liberté. »

  1. Légende de S. François.