Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/67

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les réfugiés de France. On imprime donc à Genève tous les docteurs Espagnols & Italiens. Sanchez, Escobar, Suarez, Molina, Bellarmin, Cajetan, &c ont obligation aux protestans de la conservation de leurs ouvrages. Les Genevois les donnent même tels qu’ils sont ; malgré la différence de religion, ils ne changent jamais un seul mot dans les livres qui leur sont le plus contraires.

Cette bonne foi n’est point ordinaire aux nazaréens papistes : ils augmentent & diminuent à leur fantaisie tous les écrits qui passent par leurs mains.

Au commencement de l’imprimerie, ils ajoûterent un passage d’une vingtaine de lignes dans l’histoire de Joseph : ils ont été obligés d’avouer dans la suite l’incertitude de ce passage, qui ne se trouve point dans la plûpart des manuscrits. Les molinistes, dans le siécle passé, firent faire plusieurs éditions de Jansénius, où les fameuses propositions condamnées se trouvoient : mais dans les antérieures il faut avoir le don & le talent de rendre noir ce qui est blanc, pour les y appercevoir.

Les Genevois en général sont gros & gras. Ils passent pour être de mauvaise humeur, & peu hospitaliers ;