Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/66

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contre les régles. Je sçais que les cantons protestans s’opposeroient à ce mariage ; mais peut-être n’auroient-ils pas le pouvoir d’en empêcher l’exécution : si la chose étoit une fois faite, il seroit aussi difficile d’enlever Genève des mains d’un monarque François, qu’il le fut autrefois à Ménélas de ravir sa chère Hélène de celles des Troyens. J’ai parlé quelquefois en plaisantant à plusieurs bourgeois d’ici de cette prétendue union. Ils m’ont répondu qu’ils n’avoient rien à craindre, & que leur ville, dans l’état le plus parfait, ne récompenseroit point la France de la perte de l’alliance des cantons protestans, & des fraix qu’elle seroit obligée de faire pour s’en rendre la maîtresse.

Le principal commerce de Genève consiste dans les soies, dans les livres, & dans plusieurs autres marchandises, dont ils transportent de grandes quantités dans tous les pays étrangers. Ce qu’il y a de particulier, c’est qu’on imprime dans cette ville, peu de livres qui traitent des matières du protestantisme : on auroit peine à les débiter, à cause des libraires de Hollande & d’Angleterre, qui sont à même d’en fournir plus commodément tous les nazaréens réformés ; & surtout