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DE LADY AUDLEY

tout ce qui concerne son père. Il n’y a que deux jours que sir Michaël a quitté Audley : il n’est pas probable qu’il y ait eu déjà quelque changement favorable. »

M. Audley ne devait pas voir sa cousine ce soir-là. Les domestiques de l’hôtel Clarendon lui annoncèrent que sir Michaël et sa fille étaient partis dans la matinée pour Paris avec l’intention de se rendre à Vienne.

Robert fut content de cette nouvelle ; elle lui accordait un moment de répit en lui permettant de ne rien dire au baronnet sur sa coupable femme jusqu’à son retour en Angleterre. Quand sa santé serait rétablie et le calme revenu, il serait plus facile de le renseigner sur sa femme.

M. Audley se fit conduire au Temple. Son appartement, qui lui avait toujours paru triste depuis la disparition de George Talboys, le lui parut plus encore cette fois-ci ; car ce qui n’était autrefois qu’un soupçon était devenu une affreuse réalité. Il ne lui restait plus la moindre lueur d’espérance. Ses craintes les plus horribles n’avaient été que trop bien fondées.

George Talboys avait été assassiné lâchement et traîtreusement par la femme qu’il avait aimée et pleurée.

M. Audley trouva chez lui trois lettres qui l’attendaient. Il y en avait une de sir Michaël et une d’Alicia. La troisième avait été écrite par une personne dont le jeune avocat connaissait parfaitement l’écriture, quoiqu’il ne l’eût vue qu’une fois. Il rougit à la lecture de l’adresse, et prit la lettre avec autant de soin que si le papier eût été animé. Il la tourna et retourna en tous sens, examina le timbre, la couleur du papier, puis il la glissa sous son gilet en souriant d’une étrange manière.

« Quel être déraisonnable je suis, se dit-il. N’ai-je donc tant ri des faiblesses d’autrui que pour devenir faible à mon tour ? Pourquoi ai-je rencontré cette