Page:Braddon - Le Secret de lady Audley t2.djvu/252

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
244
LE SECRET

lais le saisir au collet et le conduire à la maison lorsqu’il me prit lui-même par la main sans se lever de terre, et me demanda d’un ton sérieux qui j’étais et quels étaient mes rapports avec les gens du château d’Audley. Quelque chose dans sa manière de parler me fit penser aussitôt que c’était un gentleman, bien que je ne le connusse pas et qu’il me fût impossible de voir sa figure. Je lui parlai donc poliment.

— Je veux m’éloigner d’ici, dit-il, sans être vu de personne, entendez-vous. Je suis là depuis quatre heures à moitié mort, mais je ne veux pas que personne me voie. »

« Je lui répondis que c’était facile ; mais ma première idée me revint. Il n’avait pas de bonnes intentions, puisqu’il tenait à se retirer sans être vu.

— Pouvez-vous me conduire quelque part où il me sera permis de quitter mes habits mouillés sans que tout le monde le sache ? »

« Il s’était assis en parlant, et je vis que son bras droit était cassé et le faisait souffrir. Je lui montrai son bras en lui demandant ce qu’il avait.

— Il est cassé, mon garçon ; mais ce n’est pas grand’chose, » ajouta-t-il en se parlant à lui-même. « Un bras se raccommode, tandis qu’un cœur brisé, c’est autre chose. »

« Je lui dis que je le conduirais au cottage de ma mère, et qu’il y sécherait ses habits.

— Votre mère peut-elle garder un secret ? me demanda-t-il.

— Elle le garderait assez bien si elle s’en souvenait ; vous pourriez lui raconter tous les secrets des francs-maçons, des forestiers, des devins et des vieilles gens d’autrefois ce soir, que demain elle n’en saurait plus rien. »

« Ces paroles le rassurèrent, et il se mit sur ses jambes en s’appuyant sur moi, car ses membres