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LE SECRET

autour de lui, les enchantements se préparent, toutes les puissances de la sorcellerie sont en jeu, et la victime ne peut pas plus s’échapper que le prince aux jambes de marbre dans le conte oriental. »

En ruminant de la sorte, Robert atteignit la maison qui lui avait été désignée comme celle de mistress Barkamb. Il fut introduit aussitôt par une servante âgée et à figure sèche qui le fit entrer dans un salon où se trouvait mistress Barkamb, bonne vieille de soixante ans qui se chauffait au coin d’un maigre feu. Un vieux terrier à poil noir et gris dormait sur ses genoux. Tout dans l’appartement avait un air de vétusté, d’ordre et de confortable annonçant le calme extérieur.

« J’aimerais à vivre ici, se dit Robert, et à contempler la mer qui roule ses flots gris sous ce ciel calme et sombre. J’aimerais à vivre ici pour prier et me repentir dans cette paisible retraite. »

Il s’assit dans un fauteuil en face de celui de mistress Barkamb sur l’invitation de cette dame, et posa son chapeau par terre. Le terrier quitta les genoux de sa maîtresse et aboya au chapeau pour témoigner l’ennui qu’il lui causait.

« Je suppose, monsieur, que vous désirez louer un… sois sage, Dash… un des cottages, » dit mistress Barkamb, dont l’esprit n’allait pas au-delà d’un cercle très-étroit et qui depuis vingt ans ne songeait qu’aux locations.

Robert Audley expliqua le but de sa visite.

« Je viens vous faire une seule question, dit-il en concluant. Je veux savoir la date précise où mistress Talboys a quitté Wildernsea. Le propriétaire de l’hôtel Victoria m’a conseillé de m’adresser à vous, qui pouvez seule me la fournir. »

Mistress Barkamb réfléchit quelques instants.

« Je puis vous donner la date du départ de M. Mal-