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plinthe presque noyée d’ombre, et arrangea les grosses tiges de glaïeuls roses et blancs qu’elle contenait. Puis, ayant frôlé du bout des doigts la reliure de plusieurs livres alignés sur une table, sans en prendre aucun, elle revint à sa place ; son pied se posa sur un tabouret recouvert comme les fauteuils de l’ameublement d’un tissu un peu rugueux, aux tons mariés ocre et beige, et songeuse revécut la soirée passée avec son mari, la veille de son départ pour Rimouski.

Ce soir-là, après le repas, Paul se préparait à sortir.

Alix, intérieurement troublée par la perspective de la première offensive qu’elle allait tenter pour un rapprochement avec son mari, demanda du ton poli de celle qui sollicite un hôte à prolonger sa visite :

— Vous sortez, Paul ?

Comme elle l’avait dit à Gilles, Alix tenait fermement à réparer ce qu’elle avait détruit. Si elle voulait essayer d’un rapprochement immédiat avec Paul, c’était dans ce but, avec, au fond de son cœur, une lueur d’espoir que son amour y trouverait son profit. À la question de sa femme, Paul répondit :

— Oui, une course.

— Qui ne peut se remettre ?

— Si, attendez-vous quelqu’un ?

Elle eut une hésitation. Comme elle était difficile, pénible, cette ouverture.

— Je n’attends personne, dit-elle.

Il la regarda un peu surpris, puis, courtois :

— Vous voudriez que je demeure près de vous…