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— Grands dieux, fit Gilles qui rencontra sa tante tout affairée, vous ne croyez donc plus que la jeunesse est folle.

— Je le crois toujours… mais comme ces excellents Bordier, je la trouve ravissante. Si tu cherchais un compliment, prends celui-là pour toi, et vite, mon petit, aide-moi à bien recevoir mes hôtes, ajouta-t-elle en souriant, j’ai placé quelques tables pour le bridge, occupe-t-en, veux-tu ?

— Volontiers.

Lorsque Gilles se fut acquitté convenablement de sa tâche, il s’approcha d’un groupe formé d’Alix, de Luce Lebrun, jolie veuve au caractère sournois, et de Béatrice Vilet, jeune fille ultra-moderne, pas jolie, spirituelle, et qui faisait un emploi copieux de cosmétiques. Béatrice Vilet et Gilles, amis d’enfance, se tutoyaient. Mademoiselle Vilet vivait avec son père, vieillard toujours occupé de son herbier, et qui en raison de cela, n’avait guère le temps de voir à sa fille. Béatrice profitait de cette liberté surtout pour avoir son franc parler avec tous.

— Eh bien, fit Gilles, taquin, on épluche toujours le prochain ici ? Quand viendra mon tour d’être mis sur la sellette, Béatrice, dis-le moi, j’offrirai à l’avance mon supplice.

— Approche à l’instant martyr volontaire, nous n’avons qu’une cheville à planter à la chère dame qui nous occupe. Tu t’amènes à temps, je suis en appétit pour manger de l’homme.

— Et qui vas-tu déchiqueter, demanda Luce en étirant le bras pour prendre une cigarette sur le guéridon près d’elle.