Page:Breton - Un peintre paysan, 1896.djvu/205

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Ah oui ! il a par instants la joie amère du dédain hautain ; parfois aussi on sent chez lui des mouvements de rébellion, lorsqu’il semble jeter à Dieu ce reproche par la bouche de Caïn :


Ai-je dit à l’argile inerte : « Souffre et pleure ? »


Mais dans l’ensemble de sa vie, il dut avant tout goûter les immenses joies de la création de ses chefs-d’œuvre et de la certitude de leur gloire durable. Car le poète reste toujours à la hauteur de lui-même et si, par certaines heures, son esprit s’attriste et s’égare, son sens créateur trouve une heureuse compensation dans la volupté de ne jamais quitter un instant l’admirable poésie.

La muse est toujours à ses côtés, adorablement belle.

Aussi ses dernières années eussent été parfaitement heureuses, s’il n’avait toujours persisté à souffrir de l’abaissement moral et de la déchéance du goût public, trop évidents à ses yeux.

Et si on lui disait : « Mais cela n’aura qu’un temps, une réaction est inévitable, » il répondait : « Oui, mais en attendant on vit et on meurt ! »

Oui ! on meurt !

Les derniers vers qu’il a donnés à la Revue des Deux-Mondes, quelques semaines avant sa mort, ont été pour lui un dernier succès, una-