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INTRODUCTION

stituée par Philon et propagée par le courant néo-platonicien qui traverse tout le moyen âge[1].

Mais c’est dans la philosophie ancienne spécialement que le maintenaient son enseignement et son tour d’esprit ; et c’est d’elle qu’il a surtout tiré, à partir des Sceptiques grecs, la matière de ses études historiques. Deux articles sur Zénon d’Élée expliquaient d’une façon neuve sur plusieurs points le sens des fameux arguments, et visaient en même temps à en justifier, contre la banale qualification de sophismes, le sens et la portée[2] : au reste, ce que, par delà les arguments éléatiques, Brochard tenait à défendre, c’étaient les droits de la dialectique ; il aimait chez les Grecs ce goût du raisonnement porté même jusqu’au paradoxe, persuadé qu’il était qu’une démonstration subtile, quand elle est bien conduite, si elle ne découvre pas toujours une vérité, soulève toujours quelque problème. Dans une étude sur Protagoras et Démocrite, il soutenait que le relativisme de Protagoras, contrairement à une opinion assez répandue, est un relativisme réaliste, et qu’il faut attendre jusqu’à Démocrite pour la conception d’une relativité purement subjective des données sensibles[3]. Allant de même contre les expositions courantes qui représentent la logique stoïcienne comme une déformation et un affaiblissement de la logique aristotélicienne, il montrait que la théorie de la définition, celle du jugement, la préférence accordée aux syllogismes hypothétiques et disjonctifs, la théorie des signes indicatifs donnent à cette logique, avec le nominalisme qui en est le point de départ, un caractère original exprimé par la substitution de l’idée de loi à l’idée d’essence dans l’explication des choses[4]. Avait-il raison d’aller jusqu’à rapprocher là-dessus la logique stoïcienne de la logique de Stuart-Mill, ou bien, comme le soutint plus tard

  1. Le Dieu de Spinoza, p. 332-370. — L’éternité des âmes dans la philosophie de Spinoza, p. 371-383.
  2. P. 2-22.
  3. P. 23-33.
  4. P. 220-238.