Page:Brocher - Souvenirs d’une morte vivante, 1909.pdf/137

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


CHAPITRE XV


Proclamez la République ! criait-on aux députés.

M. Gambetta, sur le perron du palais, criait au peuple :

« Ce n’est pas ici que nous devons proclamer la République, mais à l’Hôtel de Ville, où nous allons nous rendre à l’instant. »

Malheureusement, ces hommes aimés du peuple n’ont pas compris ce peuple ; ils s’étaient servi de lui, comme d’un marche-pied pour monter au pouvoir, sans jamais essayer de comprendre le sentiment populaire, ni la nécessité du moment ; cela fut un grand malheur. Ils auraient pu faire de si grandes choses, s’ils avaient pénétré l’aspiration du peuple. Ils ont préféré l’abandonner après tous les sacrifices qu’il s’était imposés pendant la guerre. Le peuple, mais il n’a rien à perdre, lui ! disaient-ils. Quelle ironie !

Le peuple perd le meilleur de lui-même, il perd ses fils, sa fortune à lui ; qu’a-t-il à gagner à la guerre ? absolument rien. La France perd ses meilleurs soutiens, car ce sont les fils du peuple qui font sa richesse, puisqu’ils sont les producteurs.

Ce n’était pas sans une certaine appréhension que Gambetta fit la proposition d’aller à l’Hôtel de Ville.

Toute cette foule, sans distinction d’opinion, était