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SIXIÈME PARTIE

Ils fouillèrent. La chambre n’étant pas grande, la visite fut vite finie.

Comme le sang-froid m’avait déjà sauvée plus d’une fois, je voulus renouveler l’expérience à mes risques et périls.

J’étais toujours habillée en noir, je fis part de mon idée à ma propriétaire elle me prêta un grand voile de deuil et un châle de cachemire, dit châle en quatre, Mlle Lefèvres et moi nous descendîmes les escaliers. La porte assez étroite de la maison était gardée par trois agents de la police secrète, ils eurent la complaisance de s’effacer pour nous laisser passer. Pendant qu’on perquisitionnait chez moi, j’ai pu remarquer que la maison d’en face était aussi gardée.

Ces gens-là se font une idée si étrange des personnages qu’ils poursuivent. Ils me supposaient grande, forte, un colosse avec des griffes, des flammes jaillissant de mes yeux, un monstre enfin, aussi légendaire que les pétroleuses que je n’ai jamais rencontrées.

J’étais et je suis encore petite, simplette ; j’avais l’air comme il faut ! je prétends l’être et l’avoir été, comme il faut !

Avec mon amie, nous partîmes sans nous précipiter, nous remontâmes ainsi la rue St-Martin jusqu’à la rue Réaumur, dans laquelle nous nous sommes engagées, mais dès que nous fûmes hors des regards indiscrets, nous nous sommes dépêchées de gagner le numéro 15, où nous montâmes. Nous étions sûres de n’avoir pas été suivies. J’étais donc sauvée.

M. et Mme Vaillant étaient fabricants de chaussures.