Page:Brontë - Les Hauts de Hurle-Vent, 1946.djvu/127

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trois ans, et que l’héroïne s’était mariée. Je vais sonner ; elle sera enchantée de me trouver en état de causer gaiement. Mrs Dean est entrée.

— Il y a encore vingt minutes, monsieur, avant l’heure de votre médecine, a-t-elle commencé.

— Au diable la médecine ! Je voudrais avoir… ai-je répliqué.

— Le docteur a dit que vous deviez cesser de prendre les poudres.

— Avec grand plaisir ! Mais ne m’interrompez pas. Venez vous asseoir là. Laissez en repos ce bataillon de drogues amères. Tirez votre tricot de votre poche… bien… et maintenant continuez-moi l’histoire de Mr Heathcliff, du point où vous l’aviez laissée jusqu’aujourd’hui. A-t-il terminé son éducation sur le continent et en est-il revenu gentleman accompli ? Ou a-t-il obtenu une place d’étudiant-servant[1] dans un collège ? ou s’est-il enfui en Amérique et couvert de gloire en versant le sang des enfants de son pays natal ? ou a-t-il fait fortune d’une manière plus expéditive sur les grands chemins d’Angleterre ?

— Il est possible qu’il ait fait un peu de chacun de ces métiers, Mr Lockwood ; mais je ne puis rien vous garantir. Je vous ai déjà dit que j’ignorais comment il avait amassé son argent ; je ne connais pas davantage les moyens qu’il a employés pour tirer son esprit de la sauvage ignorance où il était plongé. Mais, avec votre permission, je vais continuer à ma façon, si vous pensez que cela doive vous distraire sans vous fatiguer. Vous sentez-vous mieux ce matin ?

— Beaucoup mieux.

— Voilà une bonne nouvelle.

  1. Etudiants qui ne payaient rien, mais rendaient certains services domestiques dans l’établissement. (Note du traducteur).