Page:Bronte - La Maitresse d anglais - tome 1.djvu/10

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tendais regretter qu’elle n’eut pas transmis son teint méridional et ses grands yeux noirs à son fils, dont le regard bleu et velouté ne manquait pas d’expression, mais dont les cheveux, qui frisaient naturellement, étaient d’une nuance si aventurée, que les amis de la maison attendaient, pour la caractériser, le reflet d’un rayon de soleil. Alors on l’appelait l’enfant aux cheveux d’or. Le jeune Graham jouissait comme sa mère de la santé la plus florissante ; comme elle, il promettait d’être un jour d’une haute taille.

Le cours du temps chez ma marraine ressemblait pour moi au cours d’une rivière qui déroule sa nappe limpide au milieu d’une plaine à peine ondulée. C’était un bonheur calme et un peu monotone ; mais je n’éprouvais le besoin d’aucune distraction ; j’appréhendais même tout changement, car j’avais de bonne heure connu la souffrance.

Un jour mistress Graham reçut une lettre dont le contenu parut lui causer beaucoup de surprise et quelque souci. Croyant d’abord que la lettre venait de mes tuteurs, je m’attendais à une communication fâcheuse, peut-être à un ordre de départ précipité ; mais ma marraine ne me dit rien ; le nuage n’avait fait que passer sur son front ; je me rassurai.

Le lendemain, à mon retour d’une longue