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MUSIQUES D’HIER ET DE DEMAIN

vaillant travailleur, fut abattu par l’imbécile destin. Oui, trop vaillant travailleur, car d’avoir sacrifié à l’art son esprit et sa chair, terrassé par l’excessive dépense cérébrale, il dut, à bout de force, interrompre sa besogne et assister — on devine avec quel désespoir ? — au naufrage de son intelligence. Je ne connais pas de martyre comparable à celui qu’endura pendant de longs mois le pauvre homme, témoin très conscient de son infortune. Je n’en sais pas de plus glorieux.

J’espérais que tout le monde, à l’Opéra, comprendrait cela et voudrait réparer par le succès l’injustice affreuse du sort. Les interprètes ont fait de leur mieux, mais l’ouvrage n’a pas été défendu comme il devait l’être et il me faut malheureusement constater l’attitude presque agressive d’une partie du public qui, le premier soir, a bruyamment quitté la salle au milieu de l’acte ? Voilà qui augmente encore ma tristesse et mes regrets. En revanche, les quelques spectateurs restés à leur place ont salué d’une acclamation enthousiaste le nom d’Emmanuel Chabrier.