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BRISÉIS

nastô a hurlé l’hymne de victoire, le Catéchiste entraîne la fiancée d’Hylas. Ils s’éloignent ensemble, sous la croix resplendissante, tandis que l’orchestre, en une péroraison d’inexprimable puissance, entonne une dernière fois le thème mystique de la religion nouvelle.

Ici s’arrêta l’inspiration du compositeur qui, je le dis bien nettement, a touché cette fois au sublime. Les deux actes suivants du beau poème de M. Catulle Mendès et d’Éphraïm Mikhaël mettent en scène le baptême, dans la mer, de Briséis, la cérémonie du mariage divin interrompue par la rencontre des deux fiancés, le combat de l’amour filial et de l’amour nuptial, la mort de la vierge qui, avant de se poignarder, a promis à Hylas d’aller le retrouver et de rester fidèle à son serment, l’attente par l’époux de l’épouse qui, fantôme, vient en effet et, chrétienne, emmène le païen dans la tombe, l’ensevelissement heureux des amants en la terre sacrée du cimetière fleuri, sous le soleil d’aurore… Et j’ai la conviction, devant la pureté de la forme littéraire, la noblesse de la vieille légende grecque, la splendeur de la musique si libre, si généreuse, si fière, si juvénile, si adorablement charmante et si virilement passionnée, qu’un chef-d’œuvre — je ne prononce pas le mot au hasard — allait naître, lorsque Chabrier, trop