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PHRYNÉ

jusque dans ses moindres subtilités l’opera-comique de M. Saint-Saëns.

Car Phryné est bien un opéra-comique, un opéra-comique classique avec airs, duos, couplets, chœurs, finales découpés dans le dialogue parlé. Ah ! pas le plus petit essai de comédie lyrique en cette œuvre que nous sentons très voulue sous son sans-gêne apparent. M. Saint-Saëns, au fond, est un classique pur et, maintenant, chacun de ses pas le rapproche davantage des classiques, ses premiers maîtres, ses premiers modèles, ses premiers inspirateurs. Sans doute, devons-nous regretter qu’un aussi haut artiste, armé pour la lutte et désigné pour la victoire comme pas un de ses contemporains ne le fut, suive si exclusivement les traditions ancestrales, n’emploie pas plus audacieusement son ardeur créatrice. Mais M. Saint-Saëns a depuis longtemps choisi sa route et Phryné marque une étape méthodique de sa carrière.

On sait, en effet, que l’auteur de Samson et Dalila, poussé par un besoin de combativité auquel il n’a jamais cessé d’obéir, conduit également par un esprit de contradiction inné chez lui, se désintéressa peu à peu de ce qu’il avait aimé à une époque déjà éloignée de sa vie.

Besoin de combativité, peut-être aussi besoin de liberté l’ont fait tout à coup jeter aux orties