Page:Buffon - Oeuvres completes, 1829, T02.djvu/126

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
120
THÉORIE DE LA TERRE.

arrive à la mer, et qu’en supputant la quantité d’eau que tous les fleuves y portent, on viendroit à connoître l’ancienneté du monde par le degré de la salure de la mer.

Les plongeurs et les pêcheurs de perles assurent, au rapport de Boyle, que plus on descend dans la mer, plus l’eau est froide ; que le froid est même si grand à une profondeur considérable, qu’ils ne peuvent le souffrir, et que c’est par cette raison qu’ils ne demeurent pas long-temps sous l’eau, lorsqu’ils descendent à une profondeur un peu plus grande, que quand ils ne descendent qu’à une petite profondeur. Il me paroît que le poids de l’eau pourroit en être la cause aussi bien que le froid, si on descendoit à une grande profondeur, comme trois ou quatre cents brasses ; mais, à la vérité, les plongeurs ne descendent jamais à plus de cent pieds ou environ. Le même auteur rapporte que dans un voyage aux Indes orientales, au delà de la ligne, à environ 35 degrés de latitude sud, on laissa tomber une sonde à quatre cents brasses de profondeur, et qu’ayant retiré cette sonde qui étoit de plomb et qui pesoit environ trente à trente-cinq livres, elle étoit devenue si froide, qu’il sembloit toucher un morceau de glace. On sait aussi que les voyageurs, pour rafraîchir leur vin, descendent les bouteilles à plusieurs brasses de profondeur dans la mer : et plus on les descend, plus le vin est frais.

Tous ces faits pourroient faire présumer que l’eau de la mer est plus salée au fond qu’à la surface ; cependant on a des témoignages contraires, fondés sur des expériences qu’on a faites pour tirer dans des vases, qu’on ne débouchoit qu’à une certaine profon-