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ART. VIII. PRODUCTIONS DE LA MER.

l’amas de coquilles est-il de beaucoup plus grand que nous ne l’avons posé ; qu’il soit seulement double, combien la merveille augmente-t-elle !

» Dans les faits de physique, de petites circonstances que la plupart des gens ne s’aviseroient pas de remarquer, tirent quelquefois à conséquence et donnent des lumières. M. de Réaumur a observé que tous les fragments de coquilles sont, dans leur tas, posées sur le plat et horizontalement : de là il a conclu que cette infinité de fragments ne sont pas venus de ce que, dans le tas formé d’abord de coquilles entières, les supérieures auroient, par leur poids, brisé les inférieures ; car de cette manière il se seroit fait des écroulements qui auroient donné aux fragments une infinité de positions différentes. Il faut que la mer ait apporté dans ce lieu là toutes ces coquilles, soit entières, soit quelques unes déjà brisées ; et comme elle les apportoit flottantes, elles étoient posées sur le plat et horizontalement ; après qu’elles ont été toutes déposées au rendez-vous commun, l’extrême longueur du temps en aura brisé et presque calciné la plus grande partie sans déranger leur position.

» Il paroît assez par là qu’elles n’ont pu être apportées que successivement ; et en effet, comment la mer voitureroit-elle tout à la fois une si prodigieuse quantité de coquilles, et toutes dans une position horizontale ? elles ont dû s’assembler dans un même lieu, et par conséquent ce lieu a été le fond d’un golfe ou une espèce de bassin.

» Toutes ces réflexions prouvent que, quoiqu’il ait dû rester, et qu’il reste effectivement sur la terre beaucoup de vestiges du déluge universel rapporté par l’É-