Page:Buffon - Oeuvres completes, 1829, T02.djvu/238

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
232
THÉORIE DE LA TERRE.

d’inégalités, et coupé par des bancs de sable : dans tous ces endroits montueux et entrecoupés, les cou-

    ou descendu à moitié, elles ont assez de force pour changer sa direction. Comme il ne peut alors retourner vers l’est, parce que l’eau est toujours stable près de la pointe de Lofœde, ainsi que je l’ai déjà dit, il faut nécessairement qu’il aille vers l’ouest, où l’eau est plus basse. » Cette explication me paroît bonne et conforme aux vrais principes de la théorie des eaux courantes.

    Nous devons encore ajouter ici la description du fameux courant de Charybde et Scylla, près de la Sicile, sur lequel M. Brydone a fait nouvellement des observations qui semblent prouver que sa rapidité et la violence de tous ses mouvements est fort diminuée.

    « Le fameux rocher de Scylla est sur la côte de la Calabre, le cap Pelore sur celle de Sicile, et le célèbre détroit du Phare court entre les deux. L’on entend, à quelques milles de distance de l’entrée du détroit, le mugissement du courant : il augmente à mesure qu’on s’approche, et, en plusieurs endroits, l’eau forme de grands tournants, lors même que tout le reste de la mer est uni comme une glace. Les vaisseaux sont attirés par ces tournants d’eaux : cependant on court peu de danger quand le temps est calme : mais si les vagues rencontrent ces tournants violents, elles forment une mer terrible. Le courant porte directement vers le rocher de Scylla : il est à environ un mille de l’entrée du Phare. Il faut convenir que réellement ce fameux Scylla n’approche pas de la description formidable qu’Homère en a faite ; le passage n’est pas aussi prodigieusement étroit ni aussi difficile qu’il le représente : il est probable que depuis ce temps il s’est fort élargi, et que la violence du courant a diminué en même proportion. Le rocher a près de deux cents pieds d’élévation ; on y trouve plusieurs cavernes et une espèce de fort bâti au sommet. Le fanal est à présent sur le cap Pelore. L’entrée du détroit entre ce cap et la Coda di Volpe en Calabre, paroît avoir à peine un mille de largeur ; son canal s’élargit, et il a quatre milles auprès de Messine, qui est éloignée de douze milles de l’entrée du détroit. Le célèbre gouffre ou tournant de Charybde est près de l’entrée du havre de Messine : il occasione{{{1}}} souvent dans l’eau un mouvement si irrégulier, que les vaisseaux ont beaucoup de peine à y entrer. Aristote fait une longue et terrible description de ce passage difficile. Homère, Lucrèce, Virgile, et plusieurs autres poëtes, l’ont décrit comme un objet qui inspiroit la plus grande terreur. Il n’est certainement pas si formidable aujourd’hui, et il est très probable que