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THÉORIE DE LA TERRE.

son niveau. Je vis sortir d’un même nuage douze à quatorze trombes complètes, dont trois seulement considérables, et surtout la dernière. Le canal du milieu de la manche étoit si transparent, qu’à travers je voyois les nuages que derrière elle, à mon égard, le soleil éclairoit. Le nuage, magasin de tant de trombes, s’étendoit à peu près du sud-est au nord-ouest, et cette grosse trombe, dont il s’agit uniquement ici, me restoit vers le sud-sud-ouest : le soleil étoit déjà fort bas, puisque nous étions dans les jours les plus courts. Je ne vis point d’ondées tomber du nuage : son élévation pouvoit être de cinq ou six cents toises au plus. »

Plus le ciel est chargé de nuages, et plus il est aisé d’observer les trombes et toutes les apparences qui les accompagnent.

M. de La Nux pense, peut-être avec raison, que ces trombes ne sont que des portions visqueuses du nuage, qui sont entraînées par différents tourbillons, c’est-à-dire par des tournoiements de l’air supérieur engouffré dans les masses des nuées dont le nuage total est composé.

Ce qui paroît prouver que ces trombes sont composées de parties visqueuses, c’est leur ténacité, et, pour ainsi dire, leur cohérence ; car elles font des inflexions et des courbures, même en sens contraire, sans se rompre : si cette matière des trombes n’étoit pas visqueuse, pourroit-on concevoir comment elles se courbent et obéissent aux vents, sans se rompre ? Si toutes les parties n’étoient pas fortement adhérentes entre elles, le vent les dissiperoit, ou tout au moins les feroit changer de forme ; mais comme cette