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THÉORIE DE LA TERRE.

thenay, par un si grand embrasement, qu’il éclairoit plus de vingt-quatre milles de pays du côté de Catane ; les explosions furent bientôt si fréquentes, que, dès le 3 mars, on apercevoit une nouvelle montagne au dessus du sommet de l’ancienne, de la même manière que nous l’avons vu au Vésuve dans ces derniers temps. Enfin les jurats de Mascali ont mandé le 12, que le 9 du même mois les explosions devinrent terribles ; que la fumée augmenta à tel point que tout le ciel en fut obscurci ; qu’à l’entrée de la nuit il commença à pleuvoir un déluge de petites pierres, pesant jusqu’à trois onces, dont tous le pays et les cantons circonvoisins furent inondés ; qu’à cette pluie affreuse, qui dura plus de cinq quarts d’heure, en succéda une autre de cendres noires, qui continua toute la nuit ; que le lendemain, sur les huit heures du matin, le sommet de l’Etna vomit un fleuve d’eau comparable au Nil ; que les anciennes laves les plus impraticables par leurs montuosités, leurs coupures, et leurs pointes, furent en un clin d’œil converties par ce torrent en une vaste plaine de sable ; que l’eau, qui heureusement n’avoit coulé que pendant un demi-quart d’heure, étoit très chaude ; que les pierres et les sables qu’elle avoit charriés avec elle ne différoient en rien des pierres et du sable de la mer ; qu’après l’inondation il étoit sorti de la même bouche un petit ruisseau de feu qui coula pendant vingt-quatre heures ; que le 11, à un mille environ au dessous de cette bouche, il se fit une crevasse par où déboucha une lave qui pouvoit avoir cent toises de largeur et deux milles d’étendue, et qu’elle continuoit son cours au travers de la campagne le jour même que M. d’Arthenay écrivoit cette relation.