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ART. XVI. VOLCANS ET TREMBLEMENTS DE TERRE.

les gros lingots de fonte de fer qu’on appelle gueuses, qui coulent dans un moule ou canal dont la pente est presque horizontale, on s’apercevra aisément qu’elles tendent à se courber en effet d’autant plus qu’elles ont plus d’épaisseur[1]. Nous avons démontré, par les expériences rapportées dans les mémoires précédents, que les temps de la consolidation sont à très peu près proportionnels aux épaisseurs, et que la surface de ces lingots étant déjà consolidée, l’intérieur en est encore liquide : c’est cette chaleur intérieure qui soulève et fait bomber le lingot ; et si son épaisseur étoit plus grande, il y auroit, comme dans les torrents de lave, des explosions, des ruptures à la surface, et des jets perpendiculaires de matière métallique poussée au dehors par l’action du feu renfermé dans l’intérieur du lingot. Cette explication, tirée de la nature même de la chose,

    bulles de verre concaves, sous une forme hémisphérique. Ces bulles crèvent, lorsque la force expansive est très active, et que la matière a moins de fluidité ; alors il en sort avec bruit un jet rapide de flamme ; lorsque cette matière vitreuse est assez adhérente pour souffrir une grande dilatation, ces bulles, qui se forment à sa surface, prennent un volume de huit à dix pouces de diamètre sans se crever, lorsque la vitrification en est moins achevée, et qu’elle a une consistance visqueuse et tenace ; ces bulles occupent peu de volume, et la matière, en s’affaissant sur elle-même, forme des éminences concaves, que l’on nomme yeux de crapaud. Ce qui se passe ici en petit dans le laitier des fourneaux de forge, arrive en grand dans les laves des volcans.

  1. Je ne parle pas ici des autres causes particulières, qui souvent occasionent la courbure des lingots de fonte. Par exemple, lorsque la fonte n’est pas bien fluide, lorsque le moule est trop humide, ils se courbent beaucoup plus, parce que ces causes concourent à augmenter l’effet de la première : ainsi l’humidité de la terre sur laquelle coulent les torrents de la lave aide encore à la chaleur intérieure à en soulever la masse, et à la faire éclater en plusieurs endroits par des explosions suivies de ces jets de matière dont cous avons parlé.