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THÉORIE DE LA TERRE.

venons de parler, comme on peut le remarquer aisément sur le sommet des hautes montagnes, qui sont pour la plupart de cette espèce de rocher, et sur lesquels on ne peut pas marcher un peu de temps sans s’apercevoir que ces clous coupent et déchirent le cuir des souliers. Ce roc vif qu’on trouve au dessus des hautes montagnes, et que je regarde comme une espèce de granite, contient une grande quantité de paillettes talqueuses, et il a tous les genres de dureté au point de ne pouvoir être travaillé qu’avec une peine infinie.

J’ai examiné de près la nature de ces clous[1] qu’on trouve dans le grès et dans le roc vif, et j’ai reconnu

  1. J’ai dit qu’on trouve dans les grès des espèces de clous, etc. Cela semble indiquer que les grandes masses de grès doivent leur origine à l’action du feu primitif. J’avois d’abord pensé que cette matière ne devoit sa dureté et la réunion de ses parties qu’à l’intermède de l’eau ; mais je me suis assuré, depuis, que l’action du feu produit le même effet, et je puis citer sur cela des expériences qui d’abord m’ont surpris, et que j’ai répétées assez souvent pour n’en pouvoir douter.
    EXPÉRIENCES.

    J’ai fait broyer des grès de différents degrés de dureté, et je les ai fait tamiser en poudre plus ou moins fine pour m’en servir à couvrir les cémentations dont je me sers pour convertir le fer en acier : cette poudre de grès répandue sur le cément, et amoncelée en forme de dôme de trois ou quatre pouces d’épaisseur, sur une caisse de trois pieds de longueur et deux pieds de largeur, ayant subi l’action d’un feu violent dans mes fourneaux d’aspiration pendant plusieurs jours et nuits de suite sans interruption, n’étoit plus de la poussière de grès, mais une masse solide, que l’on étoit obligé de casser pour découvrir la caisse qui contenoit le fer converti en acier boursouflé ; en sorte que l’action du feu sur cette poudre de grès en a fait des masses aussi solides que le grès de médiocre qualité qui ne sonne point sous le marteau. Cela m’a démontré que le feu peut, tout aussi bien que l’eau, avoir agglutiné les sables vitrescibles, et avoir par conséquent