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l’histoire de Franco de Gabourd, un jésuite qui a introduit, dans un ouvrage qui n’apprend rien, l’art de mentir si merveilleusement développé par ses confrères.

Il paraît qu’un des nouveaux dogmes qu’on proclamera au prochain concile œcuménique sera l’infaillibilité du Pape.

Enfin ! il était temps. Depuis dix-huit cents ans que le christianisme est établi, on avait toujours tardé à proclamer cette vérité indispensable.

Jusqu’à présent les papes s’étaient toujours trompés ; maintenant, on a la certitude qu’ils ne se tromperont plus. Du moins on le croira, c’est tout comme.

Je n’ai pu voir dans l’histoire, ni puis-je voir de nos jours les conciles établir sans cesse de nouveaux dogmes sans faire cette réflexion : l’œuvre du Christ était donc incomplète, n’était qu’une ébauche insignifiante, pour que quatre à cinq cents bonshommes, avec la mitre et la crosse, signes d’une profonde sagesse, se croient tenus de se réunir tous les vingt ans pour la retoucher, la refaire et la compléter ?

On me communique le fait suivant, avec des preuves d’exactitude :

« Un jeune homme se trouve dans une maison appartenant à l’évêché de Montréal. Il doit quelques mois de son loyer ; il est malade, lui et sa famille, et, sans l’avertir, mais, au contraire, après lui avoir dit « vous pouvez prendre votre temps, » on le fait saisir, et on veut faire vendre ses effets : tout cela au nom de la charité, bien entendu. Le jeune homme va voir les messieurs de l’évêché ; il n’a pas d’argent, et on le met presque à la porte en lui disant que s’il ne paye pas, il va être saisi sans pitié. Tout le monde le reçoit mal, excepté M. F… qui lui serre un peu les mains et lui dit : « Pauvre enfant, prie Dieu, ça me fait bien de la peine de te voir ainsi, mais je ne peux rien y faire. »

Quant au petit M. Leblanc, il dit au jeune homme : « Vous êtes pas mal impertinent de venir me troubler quand je vais me mettre au lit : payez, je ne puis attendre davantage, et allez-vous en. »

L’impitoyable cruauté des successeurs du Christ, lorsqu’il s’agit d’argent, s’explique très facilement.

Ils sont logiques. Dès lors qu’ils prêchent le mépris des biens de la terre, il s’en suit qu’ils doivent chercher à vous en dépouiller le plus possible.

Mais ils joignent à ce motif selon le cœur de Dieu des raisons toutes terrestres, dont une que voici.