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Lecteurs ! lecteurs ! le Pays a dit ce matin… qu’il voulait instruire et intéresser !!!!!!!

Mourons !

La concurrence est une chose licite et louable : elle favorise le progrès industriel. Les religieuses l’ont si bien comprise et la pratiquent si bien qu’elles font aux pauvres femmes du peuple, qui travaillent pour les magasins, une concurrence qui les met sur la paille, ce qui est mauvais dans cette saison-ci.

Grâce à cette concurrence, les femmes du peuple ne trouvent plus d’ouvrage, mendient, ou…

Qu’une industrie prospère ou débute, dans notre ville, avec de belles perspectives, de suite vous voyez arriver les émissaires de certaines congrégations qui demandent qu’on leur cède la besogne, et qui offrent de la faire au rabais.

Naturellement, l’industriel livre le travail. Alors vient l’ouvrière qui, apprenant que les religieuses font l’ouvrage pour tel prix, l’accepte pour le même prix, plutôt que de n’en pas avoir.

À leur tour, les religieuses reviennent et offrent de faire l’ouvrage à plus bas prix encore.

La pauvre ouvrière, qui n’a pas les avantages qu’ont les congrégations dont je parle, qui n’est pas nourrie, chauffée, éclairée par la charité publique, renonce à faire l’ouvrage à perte, et la voilà sans ressource.

Chacun est libre sans doute d’entreprendre un travail à aussi bas prix qu’il le veut ; et le marchand, qui ne consulte que son intérêt, cherche à réaliser le plus de profits possible sur ses ouvriers.

Ce n’est pas là la question. Une concurrence ne saurait être louable, ni même légitime, si elle n’est faite à moyens égaux. Mais que des congrégations, qui vivent de la piété crédule et de la charité du peuple, viennent enlever le pain aux pauvres femmes de ce peuple, aux ouvrières, mères de famille souvent, qui n’ont qu’un métier pour vivre, c’est un de ces petits supplices arrosés d’eau bénite, comme on en tient en réserve pour précipiter plus vite dans le paradis les gens qui ont la vie dure.

Il est fort heureux qu’il y ait des sœurs qui entendent le commerce. Sans elles, on vivrait trop longtemps dans cette vallée de larmes.

Je reçois la lettre suivante de Québec :

Monsieur, — Votre Lanterne est suivie avec beaucoup d’intérêt par un grand nombre de personnes, chaque semaine.

Comme peu de protestants cherchent à troubler les catholiques dans l’exercice de leur religion, de même je crois qu’il n’y a qu’une classe de catholiques romains qui veuille nous priver de notre liberté religieuse.

C’est là la classe que vous attaquez si courageusement, et contre laquelle vous avez besoin de tous les appuis possibles.