Page:Bunyan - Le pelerinage du chretien a la cite celeste.djvu/56

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d’avis qu’il fallait faire un trop grand détour pour passer par la porte, et qu’en conséquence ils avaient pour habitude d’abréger la route en sautant par dessus la muraille, ainsi qu’ils venaient de le faire.

Chrétien. Mais le Seigneur de la cité vers laquelle nous marchons ne vous tiendra-t-il pas pour transgresseurs, si vous désobéissez ainsi à sa volonté sainte ?

Formaliste et Hypocrite répondirent que cela ne le regardait pas, qu’ils n’avaient fait que suivre d’anciens usages, et qu’au besoin ils pourraient prouver que mille ans auparavant les choses se passaient déjà de la même manière.

Mais pensez-vous, dit Chrétien, que votre conduite soit justifiable devant la loi ?

Ils répondirent qu’une coutume suivie depuis un si grand nombre d’années ne pouvait manquer d’avoir force de loi aux yeux de tout juge impartial. D’ailleurs, ajoutèrent-ils, pourvu que nous soyons dans le chemin, qu’importe de quelle manière nous y sommes entrés ? Nous y voilà, cela suffit : bien que nous ayons sauté par dessus la muraille, nous sommes sur la route aussi bien que vous qui avez passé par la porte ; quel avantage avez-vous donc sur nous ?

Je marche, dit Chrétien, selon la volonté de mon maître, mais vous, n’obéissez qu’aux mouvements déréglés de votre propre imagination. Déjà le Seigneur à qui appartient ce chemin vous regarde comme des larrons ; il est donc fort à craindre