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BASILIQUES DE ROME DU IXe AU XIIIe SIÈCLE.

gré des modifications considérables, c’est encore un noble édifice qui présente l’architecture des basiliques sous un bel aspect.

La nouvelle église de S. Lorenzo fuori le mura [a] (commencement du XIIIe siècle), à laquelle l’ancienne sert de chœur, a également un entablement droit ; les dimensions en sont considérables ; l’art y a fait sans doute un grand effort, car il s’agissait d’une église patriarcale, et il est permis d’y voir un exemple typique de l’art romain immédiatement après Innocent III. — Le portique très spacieux a été calculé en vue d’une nombreuse assistance.

L’empêchement et l’embarras, lorsque manquaient les colonnes antiques, apparait dans une église de la même époque, SS. Vincenzo ed Anastasio alle tre Fontane [b], à une demi-lieue de S.-Paul. Cette même époque qui a créé en Toscane le baptistére de Florence et San-Miniato, n’a peut-être rien produit de plus malheureux que cette église à piliers. (Les fenêtres en sont fermées par des plaques de marbre à jour).

Là où le manque absolu de colonnes antiques avait déjà forcé les architectes de se suffire à eux-mêmes, il y a singulièrement plus d’indépendance. Et cela aux portes mêmes de Rome. La cathédrale [c] de Viterbe (XIIe siècle ?) avec colonnes exécutées exprès, égales et imposantes, est d’un effet original. La belle église S. Maria in Toscanella [d] (1206) ne le cède pas aux plus nobles exemplaires de l’architecture toscane avec son portail profond et sa grande rosace ; à l’intérieur, des colonnes du même temps, espacées, une toiture apparente et des restes considérables d’ancienne peinture. (L’auteur ne connait cette église que par des dessins.) D’autres basiliques, à Viterbe [e] même, à Montefiascone [f], Orvieto [g], etc., sont informes et barbares[1] ; la cathédrale de Narni [h], et, dans cette même ville, le portique de l’église de la Pensola ont le curieux arc surbaissé que nous avons déjà mentionné. — De la basilique à trois nefs S. Agostino del Crocifisso devant Spoleto [i] il existe encore le chœur et la façade occidentale couverte de sculptures ornementales vraiment classiques. C’est une très intéressante alliance de fragments antiques et d’architecture paléo-chrétienne, plus achevée encore.


Les campaniles (clochers) qui s’élèvent en Italie à partir du VIIIe siècle (l’usage des cloches ne commence que vers 600) ont dans plusieurs basiliques ou églises plus récentes de Rome plus de valeur par leur bel effet pittoresque que par leur forme artistique. Eux aussi, souvent, sont construits à l’aide de fragments antiques ; nombre de corniches qui séparent les différents étages, les colonnettes qui soutiennent les fenêtres, gé-

  1. Elles ont de grosses colonnes ramassées et des nefs centrales étroites, des intervalles considérables et des fenêtres supérieures semblables à des meurtrières ; elles sont très proches parentes des basiliques toscanes plus barbares encore que nous nommerons plus loin. Les corniches en pierre du toit sont déjà parfois d’une structure plus élégante et plus vigoureuse, tandis qu’à Rome elles sont encore comme nulles.