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ARCHITECTURE CHRÉTIENNE.

pour consolider l’édifice, un mur supporté par deux colonnes et trois arcs qui vient couper en deux de tambour de la coupole. Depuis le XVe siècle un cercle extérieur de colonnes, fermé de murs, est devenu la limite de l’église. Originairement il y avait un second pourtour divisé par quatre bras en forme de croix dont il ne reste aujourd’hui que des débris. Ce sont de vastes espaces disposés pour recevoir non pas des voûtes mais de simples plafonds. L’autel sous le haut espace du milieu est moderne. Les chapiteaux ioniques extrêmement grossiers ne se rapportent guère au temps de la consécration, que nous plaçons entre 468 et 480, si l’on considère que ceux de Santa Maria Maggiore sont à peine plus anciens de trente ans ; cependant l’état de Rome à cette époque expliquerait les formes les plus étranges.

L’église S. Lorenzo [a] à Milan[1], malgré le détail malheureux de la dernière l’reconstruction (fin du XVIe siècle), reste à l’intérieur un des monuments les plus beaux d’Italie, et l’un de ceux qui ont exercé le plus d’influence. D’anciens témoignages nous révèlent l’admiration que S. Lorenzo excitait chez G. de Sangallo et nombre d’autres grands architectes de la renaissance. Léonard de Vinci s’inspire souvent de cette église dans ses études sur les constructions centrales. C’est enfin à l’enthousiasme qui qu’inspirait S. Lorenzo à un Bramante et à ses élèves que nous devons non seulement la magnifique coupole de la cathédrale de Pavie, mais la plus belle œuvre de l’architecture moderne, le plan de S. Pierre de Rome. Dans ce projet, c’est manifestement à S. Lorenzo que Bramante a emprunté la composition d’une coupole centrale aven les estrémités circulaires des bras de la croix, les pourtours, et les tours angulaires. Aussi bien, il y a peu de monuments aussi instructifs pour l’architecture. On voit ici combien il importe à l’impression d’ensemble d’une église que dès l’entrée, le regard, à travers la fantaisie des colonnes, aille droit au centre, et aussi, par quelle richesse de contrastes, un pourtour clair agit sur un pourtour obscur, combien la lumière donne de légèrete à l’étage supérieur, combien l’ombre prête au bas de solidité et de force. C’est le système des niches (exedra) surtout qui ici, gagne en importance : ce ne sont pas seulement des demi-cylindres isolés et surmontés d’une demi-coupole, mais des constructions profondes et à jour, formées de deux colonnades superposées qui conduisent aux pourtours inférieur et supérieur de la coupole. S’il y avait huit de ces niches, ce riche motif paraitrait mesquin et confus comme à S. vitale à Ravenne ; mais il n’y en a que quatre. Dans la construction primitive, l’espace au-dessous de la coupole était carré ; ce n’est qu’au-dessus des galeries que commençait la forme polygonale. Le rythme de cette architecture était ainsi plus

  1. L’auteur (voir son Histoire de la Renaissance en Italie, p. 98}, à en juger d’après le plan fondamental de l’édifice qui décide la question, le considère toujours comme un palais ou comme les thermes de Maximien Hercule, vers 300 ; sans Gallo Placidia ; il fut consacré comme église.