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COURS DE CLOÎTRE. — STYLE ROMAN.

rieur. Les plus simples (près de S. Lorenzo fuori, S. Vincenzo alle tre Fontane, S. Sabina [a]) ne l’emportent sur les cloîtres romans de l’Allemagne que par le marbre qui entre dans leur construction. La cour de S. Scolastica [b] à Subiaco, au contraire, témoigne déjà d’un essai de donner aux portiques une vie et une âme en les rapprochant des formes architecturales antiques ; à Saint-Jean de Latran et à l’abbaye de Saint-Paul [c] les oloitres embaumés du parfum des roses nous montrent ces fermes antiques animées d’une vie nouvelle et originale, tant par l’emploi des mosaïques les plus somptueuses que par des ornements de marbre ciselée (commencement du XIIIe siècle). Le caractère des formes propre à l’époque d’Innocent III se montre ici plus directement que dans les basiliques entières de ce temps construites sur des modèles plus anciens. Le porche de la cathédrale de Cività Castellana [d] présente un retour semblable aux modèles classiques, uni à une mosaïque très ornée. Les derniers Cosmates travaillaient dans le style gothique : nous en reparlerons à l’occasion.

(Voyez plus loin, dans le chapitre sur l’architecture normanno-sicilienne, les travaux de ce genre qui appartiennent à la basse Italie.)

L’on ne saurait nier que l’art italien ne se contente de ce jeu agréable des matériaux précieux et des couleurs, tandis qu’en même temps l’architecture fait dans le Nord les plus grands progrès. Celle-ci, privée, presque dès l’origine, de fragments antiques et surtout animée d’un tout autre esprit, avait, dans l’intervalle, transformé les restes du style romain expirant en un style original, le roman qui, vers 1150, était déjà à la veille de devenir le gothique. Ce style roman trouve alors dans le Nord et dans le centre de l’Italie un pendant qui a son prix.


C’est incontestablement aux Toscans que revient le grand mérite d’avoir, les premiers en Italie, donné une vie nouvelle à la basilique. L’esprit élevé qui distinguait oe peuple au moyen âge, et à qui l’on pardonnera aisément d’avoir de temps en temps versé dans la confusion de Babel, ne se contentait déjà plus d’églises étroites, sans apparence extérieure, et richement ornées au dedans ; il visait à des constructions monumentales dignes de lui. Cette tendance nouvelle de l’architecture se montre dès le XIe siècle, d’abord dans le choix des matériaux. Le grès et le calcaire, que l’on avait tout près, paraissaient se décomposer trop vite ; on eut recours au marbre pour en incruster du moins à défaut du reste, le noyau de la construction. Le marbre blanc de Carrare, le marbre rouge de Sienne, le marbre vert de Prato, presque noir, mais d’un effet plus fin, furent tour à tour appliqués aux formes architecturales ou sur les panneaux de l’édifice, auquel ils prêtaient un charme de coloris tout particulier. Une distribution plus habile aurait même parfois donné à l’effet d’ensemble plus d’élégance encore (au baptistère de Florence, par exemple). Pour la première fois, les murs extérieurs des églises