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ARCHITECTURE GOTHIQUE.

au triomphe du style gothique dans l’Italie centrale. Avec S. Francesco, l’ordre considérable qui porte le nom du saint enseveli à Assise même, prit parti pour les novateurs, et naturellement l’ordre des Dominicains ne pouvait rester en arrière. Nous aurons à citer plus tard les églises les plus importantes de ces deux ordres puissants ; notre objet n’est ici que de signaler le type général qui s’établit pour leurs églises. Aux XIIIee et XIIIe siècles, les églises des ordres mendiants sont, dans le Nord, des églises à trois nefs soutenues par des colonnes et plafonnées ; le chœur est élancé, voûté, à fenêtres hautes, et de plan polygonal ; le toit porte une flèche très mince. En Ombrie et en Toscane, au contraire (pour la Haute-Italie voir plus bas), ces églises n’ont généralement qu’une seule nef large, parfois énorme, avec une charpente apparente (S. Francesco et S. Domenico à Sienne [a], S. Francesco à Pise [b], etc.)[1], et un seul transept sur lequel s’ouvrent en arrière cinq, sept, jusqu’à onze chapelles carrées ; celle du milieu, un peu plus grande, forme le chœur. Dans les églises moins importantes le transept manque, et il n’y a que trois espaces ajoutés à la nef, deux petits et un plus grand ; dans les grandes églises, par contre, le transept a des chapelles des deux côtés et parfois meme sur les deux façades. Vus du dehors, ces édifices sont très simples ; ce sont généralement des constructions en briques avec des bandes de maçonnerie et une frise de petits arcs ; presque toutes les façades attendent encore le revêtement ; tout au plus y a-t-il d’achevé un portail avec une lunette peinte, et encore est-ce d’une époque postérieure. Parmi les campaniles en briques, celui de S. Francesco [c] à Pise est un des meilleurs. — D’ailleurs, cette forme d’église était simplement une tradition, non une loi, et justement quelques-unes des églises les plus célèbres de ces ordres ne sont pas conformes à ce type.

Considérons d’abord les édifices où le pilier est cantonné encore avec des colonnes engagées, d’après la tradition du Nord.

La cathédrale [d] d’Arezzo, commencée, suivant des recherches récentes, en 1277[2]), montre, à côté d’un extérieur primitif et peu développé, l’intérieur déjà traité à l’italienne avec des formes gothiques pures ; les murs supérieurs de la nef centrale, peu élevée au-dessus des nefs latérales, ont des fenêtres rondes : les piliers légers et espacés sont d’un bel effet par le mélange de quatre supports principaux en demi-octogone et de quatre demi-colonnes insérées entre les premiers. La grande et majestueuse chapelle de la Vierge, dans la nef latérale de gauche, semble appartenir au plan primitif.

La célèbre église des Dominicains S. Maria Novella [e] à Florence, qui offre avec cette cathédrale la plus étroite parenté, a été commencée,

  1. Peut-être bien aussi S. Francesco [f] à Viterbe avant la transformation de la nef principale.
  2. Selon Vasari, elle a été commencée par le même Jacob l’Allemand qui a bâti S. Francesco, et continuée après 1275 par Margheritone.