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PREMIÈRE RENAISSANCE.

Brunellesco pouvait en appeler aux Romains, qui avaient posé des entablements sur de simples murs nus (temples d’Antonin et de Faustine). La façade, pour laquelle, après Brunellesco, Raphaël et Michel-Ange durent aussi faire des plans, est, en dépit de magnifiques intentions, demeurée à l’état brut[1]. Le premier cloître est également attribué à Brunellesco.

Ce n’est peut-être qu’après la mort de Brunellesco[2] qu’une seconde basilique, S. Spirito [a], fut commencée d’après ses dessins (très librement utilisés, à ce que l’on croit). Ici les niches des chapelles ont la même hauteur que les nefs latérales ; la responsabilité sur ce point, comme pour tout le détail, n’appartient qu’à peine à Brunellesco (les acrotères du portail d’une grandeur exagérée et la rencontre de deux fenêtres dans un angle !). Peut-être la coupole mesquine avec tambour au-dessus de la croisée (ajoutée à S. Lorenzo) n’appartient-elle pas davantage à Brunellesco mais c’est bien lui qui fit pourtourner les nefs latérales autour du transept et du chœur, malgré la nécessité de placer ainsi une colonne dans l’axe de l’église. Notre œil est si habitué avoir des terminaisons avec intervalles en nombre impair qu’il accepte difficilement cette liberté. (On a longtemps discuté pour savoir si la façade ne devait pas avoir aussi un plein au milieu. C’est Giuliano da Majano qui, au grand chagrin de G. da Sangallo, établit l’ordonnance actuelle.) En soi, les perspectives à travers ces parties du fond sont d’une grande beauté.

La chapelle de la famille Pazzi [b], dans le cloître antérieur de S. Croce à Florence, est d’un très grand intérêt pour tout le développement de la Renaissance. La coupole en forme de conque avec petites fenêtres circulaires et toiture en tuiles est devenue la forme favorite des successeurs de Brunellesco. (Giuliano da Sangallo, entre autres, l’a imitée dans la Madonna delle Carceri à Prato, sauf que la coupole est au-dessus d’une croix grecque.) Le portique, recouvert d’une voûte en berceau sur colonnes, est très gracieusement interrompu au milieu par un arc principal et une coupole à caissons vernissées (Ventura Vitoni, entre autres, y trouva le motif du vestibule de l’Umiltà à Pistoie). Quoique négligé et inachevé, cet édifice, sans compter même les reliefs de Luca della Robbia, fera toujours résonner en nous l’un des accords les plus purs du XVe siècle.

Comme ornement d’une ville, le portique de la Maison des enfants trouvés [c] sur la Piazza dell’ Annunziata (à gauche, en venant de l’église), est un véritable modèle de beauté simple. Ce ne devait être ni un corps-de-garde ni un lieu de réunions politiques, mais une vaste salle d’attente en plein soleil ; une charmante ornementation (médaillons d’en-

  1. Le projet de Michel-Ange est connu ; il y a plusieurs études au Musée Buonarroti [d]. Aux Offices [e], nombre de façades de G. da Sangullo, dont quelques-unes paraissent supérieures à celles de son grand ami.
  2. Le S. Spirito, qui brûla en 1471, n’était pas sur le même terrain que la construction nouvelle.