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PREMIÈRE RENAISSANCE.

introduite d’abord par des étrangers, par des artistes florentins. Sous Eugène IV, apparut Antonio Filarete (v. p. 69 A) qui coula en bronze les portes de Saint-Pierre. De L.-B. Alberti et de Bern. Rossellino, et de leurs travaux à Rome sous les papes Nicolas V et Pie II, il ne s’est rien conservé d’essentiel. Dans quelle mesure s’exerça ici, soit directement (comme à S. Francesco à Rimini, ou à S. Andrea à Mantoue), soit à l’aide d’architectes moins connus et de maîtres lombards (maestri comacini), et même au Nord et en dehors de la Toscane l’influence d’Alberti, c’est ce qui n’est pas encore suffisamment éclairci. — Giuliano da Majano (1432-90), à qui Vasari attribue l’architecture du Palazzo di Venezia [a], n’a, on le sait, jamais travaillé à Rome. L’auteur de ce palais n’est pas encore connu. Meo del Caprino, Giacomo da Pietrasanta et Giuliano da Sangallo, qui plus tard se firent un nom comme architectes, ne furent ici qu’entrepreneurs de la construction. Le grand Palais et le portique inférieur de S. Marco [b] ont été commencés en 1455. Le portique supérieur et le Palazzetto furent commencés en 1466 par un autre maître. La construction en fut confiée à Bernardo di Lorenzo, de Florence : se retira-t-il tout à fait, ou demeura-t-il comme collaborateur des artistes cités plus haut ? on ne sait. L’extérieur du palais, pour lequel la pierre de taille doit avoir été refusée à l’artiste, ne donne pas l’idée du style, quoique les rapports des étages entre eux soient toujours d’un effet considérable. (À remarquer, pour le temps (1464), le couronnement en pignon du portail.) Mais la partie des arcades autour de la grande cour qui est achevée et le vestibule de S. Marco d’une forme analogue (avec une très belle porte d’intérieur) trahissent une importante innovation : c’est ici pour la première fois qu’ont été logiquement exécutées les arcades à piliers avec demi-colonnes dorico-toscanes en bas, corinthiennes en haut. On n’aura pas de peine à y reconnaîtra les formes sveltes et élancées du Colosseum, auquel, paraît-il, les pierres mêmes auraient été empruntées ; seulement l’architecte a pris les attiques des différents étages pour des bases, et par suite il a donné des piédestaux même à l’ordre inférieur. Entièrement achevée, cette cour serait un des plus grands ornements de Rome. Les façades du Palazetto [c], avec leurs arcades (aujourd’hui murées) en forme de fenêtres, ne sont sur trois côtés, que les murs de fond de la loggia qui ferme le jardin : celle-ci a en bas des colonnes octogones, en haut des colonnes rondes. L’œuvre est vraisemblablement de l’architecte qui a construit le portique des SS. Apostoli.

Presque tous les édifices des vingt-cinq dernières années du xve siècle étaient jusqu’ici, d’après la tradition de Vasari, attribués au Florentin Baccio Pontelli. Mais Pontelli ne vint à Rome qu’en 1482, et il ne s’occupa que d’architecture militaire. Quant à la répartition à faire des monuments qui lui étaient attribués entre les trois maîtres, jusqu’à présent peu connus, qui prennent sa place, il y a encore quelques incertitudes. Ce sont :Meo da Settignano (del Caprino, 1430-1501), Giovannino del