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PREMIÈRE RENAISSANCE.

pelés au Nord plus souvent et en plus grand nombre que nous ne pouvons l’imaginer. (Brunellesco appelé à Milan en 1421 (?), en 1431 à Ferrare et à Mantoue, en 1436 encore à Mantoue ; — Duccio appelé à Venise en 1446, à Rimini, de 1447 à 1455 ; — Michelozzo appelé à Milan en 1462 ; Mannetti, en 1460 ; — à la même date, Meo del Caprino travaillait à Ferrare ; Luca Fancelli, quelque temps après, travaillait à Mantoue.) Les œuvres d’Alberti et de Donatello exerceront une grande influence à Rimini et à Padoue. — L’influence des innombrables Lombards travaillant dans toute l’Italie, et qui, rentrés chez eux, aidèrent à répandre le style toscan, ne fut pas moindre.

Maintenant, pourquoi au nord et à l’est de l’Apennin le style a-t-il une autre nuance qu’en Toscane, à part la construction en briques ? il serait difficile de le dire. Nous présumons cependant que c’est de Rome que s’exerça l’influence d’Alberti, et d’Urbino celle de Luciano.

Selon toute apparence, c’est la Lombardie occidentale qui pourrait revendiquer la priorité ; ce furent des Lombardi, appelés ainsi d’après leur patrie, qui, peu de temps après 1450, apportèrent ce style à demi achevé à Venise. (D’après une autre opinion, les Lombaldi seraient les membres d’une famille vénitienne de ce nom.) Il faut donc nécessairement commencer par l’architecture de l’ancien duché de Milan. Nous avouons pourtant nous laisser déterminer ici plutôt par la commodité de l’énumération topographique ; car, comme nous l’avons déjà dit, il serait difficile de donner l’histoire de l’évolution de ce style dans cette région. Nous commencerons par Milan et ses environs, nous suivrons la Via Emilia de Plaisance à Bologne, pour nous tourner vers Venise en passant par Ferrare, et pour finir avec l’ancienne terre ferme vénitienne jusqu’à Bergame inclusivement. En dehors de cet itinéraire, dans les villes de la campagne, il y a des œuvres innombrables, souvent d’une grande valeur ; nous ne donnerons que ce que nous avons vu.

Et d’abord, quels furent à Milan les débuts de la Renaissance, c’est ce que les remaniements des siècles suivants ne laissent apercevoir qu’avec peine. À côté du style nouveau, le gothique se maintint encore longtemps, comme le prouve la construction de la nef de S. Maria delle Grazie [a], vers 1470. Il est vrai que l’on peut marquer çà et là la trace d’influences florentines ; c’est ainsi, par exemple, qu’Antonio Filabete (p. 69 A) commença à Milan en nouveau style l’Ospedale Maggiore [b] ; seulement, comme nous l’avons vu, la construction fut pendant quelque temps continuée en gothique. De Michelozzo, par contre, il existe derrière S. Eustorgio [c] la vaste chapelle Portinari, dont l’extérieur est en brique, d’une beauté simple, mais dont l’intérieur est, depuis la restauration, un des plus exquis qu’il y ait dans le goût de la première Renaissance florentine. La chapelle a été bâtie de 1462 à 1466 ; la décoration, de même, a de l’importance (v. plus bas). Il y a au Castello [d] de Milan de belles constructions en partie primitives, la cour de la Rocchetta, la loggia avec