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PREMIÈRE RENAISSANCE.

décoration, et cependant, même sans égard à cette destination, elle a de la beauté. C’est ici pour la dernière fois que les nervures de la voûte d’arête donnent à l’édifice de la légèreté et de l’élégance. Derrière le mur de l’autel, la même construction est reproduite pour le chœur. Elle se retrouve encore çà et là dans quelques cloîtres de femmes. (S. Paolo à Milan est un exemple plus récent.) — S. Nazaro [a] a conservé son étrange avant-corps de 1518, avec les sarcophages de la famille de Trivulzi distribués dans les niches du haut. C’est une œuvre du Bramantino. La maison de la Via Borgonuovo, no 25, avec pilastres sveltes et rétrécis en haut, doit aussi être du même maître.

Nous passons maintenant à la cathédrale [b] de Côme (v. p. 67), l’un des plus beaux exemplaires de la meilleure Renaissance que possède l’Italie. Les travaux commencèrent par le revêtement extérieur latéral du pied de la croix. Le beau portail du sud est daté de 1491. Il est, avec les trois fenêtres et la corniche, l’œuvre de Bramante, et non point de Tommaso Rodari. Ce dernier pourtant, avec ses trois frères, travailla à l’édifice à partir de 1486, et c’est lui qui de 1505 à 1509 exécuta la magnifique Porta della Rana. En 1513 commença la construction des trois bras terminés en demi-décagone. Les corniches et les contreforts étaient d’avance déterminés par les plans de Bramante pour la partie antérieure. Le reste repose sur un modèle de Rodari, corrigé par Cristoforo Solari. L’extérieur est d’une ordonnance élégante et simple ; dans la frise principale, sur les contreforts, des porteurs d’urnes pour l’écoulement de l’eau. (La coupole octogonale, sous sa forme actuelle, est de Juvara[1]. (À l’intérieur, le chœur et le transept sont entourés d’une double rangée de colonnes corinthiennes et composites qui encadrent un système double de fenêtres ; les surfaces restantes sont décorées sobrement, il est vrai, mais avec une entente extreme : sous les fenêtres inférieures, il y a des niches avec (ou du moins pour) des statues. Les voûtes ont de somptueux caissons rouge, blanc et or. Pour la simplicité générale, qui ne vise que l’effet d’ensemble, et n’admet d’arabesques, par exemple, ni sur les pilastres ni sur les frises, cet édifice, de même que S. Maria presso S. Celso à Milan, appartient plutot déjà à l’époque classique. La Toscane n’offre rien d’égal à ces monuments ; depuis la mort d’Alberti, il n’y avait plus d’architecte de premier ordre dont l’influence fût dominante.

Dans l’église S. Lorenzo [c] à Lugano, la façade de marbre, vraisemblablement l’œuvre de Tommaso Rodari, est une sorte de résumé gracieux de la Chartreuse de Pavie ; carrée, avec un rez-de-chaussée plus élevé et un étage supérieur plus bas, percée au milieu d’une fenêtre ronde ; les pilastres, et en partie les murs, I ornés de sculptures[2].

  1. L’inscription qui donne la date du commencement des travaux du fond de l’église se trouve à l’extérieur du chœur.
  2. À citer, en outre, dans la Suisse Italienne : S. Pietro e Stefano à Bellinzona [d]. La Chiesa