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PEINTURE DU MOYEN ÂGE.

naturalisme des attitudes confinant au comique. C’est cependant un premier pas dans la recherche de la vérité naturelle.

En somme, ses mosaïques de Venise et de la Basse-Italie, très soignées, dans la dernière manière byzantine, témoignent des conditions qu’imposait à l’art contemporain l’Église d’un Gregoire VII. La nature corporelle du Christ et des saints est réduite à une simple indication. Mais dans la représentation de ce corps la plus riche matière est mise en œuvre, et de la façon la plus consciencieuse, pour faire honneur au saint, à la personne sacrée.


Les tableaux de style byzantin, surtout les Madones, sont aujourd’hui encore innombrables en Italie. C’est, il est vrai, le plus petit nembre qui appartient aux dix premiers siècles : la plupart sont des copies de Madones miraculeuses, et ne datent que de la fin du moyen âge, quand ils ne sont pas tout à fait modernes. Il ne faut pas oublier, d’ailleurs, qu’il y a çà et là en Italie des paroisses grecques chez lesquelles se sont conservées les images rituelles de Byzance. — Ces peintures sont facilement reconnaissables aux couleurs vernies qui leur sont propres, aux ombres vertes des chairs, à leurs hachures en rehauts d’or. Je ne saurais dire si dans le type de la Madone il y a à distinguer plusieurs variétés ; l’origine, en tout cas, ne saurait être aussi ancienne que pour le type du Christ. La Vierge noire n’est pas, à proprement parler, un type : l’origine en est dans la reproduction ignorante de Madones brunies par le temps. La Madone de S. Maria Maggiore [a] (chapelle de Paul V) était certainement peinte jadis (ixe siècle) en tons clairs. Mais les copies modernes, surtout quand elles ont elles-mêmes bruni, donnent l’idée du brun le plus intense.

On trouve des tableaux byzantins particulièrement instructifs dans la collection du Museo Cristiano [b] du Vatican, qui contient aussi un grand nombre de petits tableaux excellents de l’école de Giotto un du commencement du xve siècle. Rome n’a guère conservé de monuments de cette période, et cette collection en est d’autant plus précieuse. — C’est là qu’est, entre autres, la Mort de saint Ephrem, peinte par le Grec Emmanuel Tzanfurnari, au xvie siècle. —— Le Musée [c] de Naples renferme un grand nombre de tableaux byzantins.

Nana avons enfin à mentionner deux œuvres d’art, l’une sûrement, l’autre probablement exécutée à Constantinople. Le tableau d’autel de Saint—Marc [d] à Venise[1], dit la Pala d’Oro (v. p. 308 D), commandé en 976 (?), contient sur ses plaquettes d’or, restaurées au xive siècle, un assez grand nnmbre de figures et des scènes entières en émail ; — le style est à peu près celui des dernières mosaïques que nous avons citées, le travail

  1. Sur un socle de marbre, derrière le maître-autel. Il n’est malheureusement visible qu’aux grandes fêtes. Le revers, qui est visible, a été peint en 1345 par des artistes vénitiens, assez insignifiants, de l’école de Giotto.